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origine de Saint-Sauveur

Placée sur la rive droite de l'Isère, à mi-distance de Grenoble et Valence, notre commune est délimitée de bise, par les coteaux de Sarreloups et la profonde vallée du Puits d'enfer, jouxtant les communes de Saint-Vérand, Têche et Beaulieu, du levant, sur environ six kilomètres, par la rivière Isère, du vent, par la vallée de la Cumane et les communes de Chatte et Saint-Marcellin, du couchant et un peu de bise, par l'ancienne route royale N°92 et la commune de Saint-Vérand.

L'Isère, maillon essentiel des échanges commerciaux entre les vallées alpines et la méditerranée, va jouer un rôle prépondérant dans le développement de la commune.

L'origine du nom :

Une légende, transmise de génération en génération, rapporte que des bateliers en perdition sur l'Isère en crue, auraient fait le vœu, s'ils étaient sauvés, d'édifier une chapelle là où ils accosteraient. Le courant les dirigea contre la rive droite du torrent, au lieu dit Les Bedots, et purent ainsi échapper au naufrage. Ils firent donc construire en ce lieu une chapelle qu'ils dédièrent au Sauveur....

L'occupation romaine :

La première trace d'occupation humaine sur la commune a été révélée par la découverte d'un site gallo-romain au lieu dit Les Perrons, lors des travaux préliminaires pour la construction de l'autoroute A49 Valence-Grenoble en 1989.

Grâce aux travaux dirigés par H. de KLIJN, sous la responsabilité de G. VICHERD, nous disposons d'une très intéressante description de cet habitat gallo romain à St. Sauveur. Nous vous en livrons quelques extraits.

« Découvert dans le cadre d'un programme de prospections et de fouilles archéologiques, le site a été étudié d'avril à septembre 1989, et a porté sur une superficie décapée d'environ 2000 mètres carrés. Il a révélé trois états de constructions et occupations se situant entre le début du premier siècle et le troisième quart du troisième siècle.

Il s'agit en faite de constructions très modestes et de qualité médiocres : sol en terre battue, structure mixte de terre et de bois. Le pisé pourrait avoir été employé pour le remplissage entre sablières et poteaux porteurs (épaisseur environ 60 cm.). A l'intérieur, pour les cloisons, le torchis peut être envisagé vu les faibles largeurs.

Ces vestiges ont été profondément bouleversés par les labours et les plantations. Toutefois, en dépit de l'érosion, le premier bâtiment se présente comme un grand édifice rectangulaire de 11 mètres par 31, présentant une certaine régularité.
Le plan d'ensemble comporterait 3 modules de base : un grand espace (repéré A5) de 12,6 mètres par 11, fermé sur au moins trois côtés, et de part et d'autre, deux espaces couverts et fermés formant deux carrés de 11 mètres de côté et divisé chacun en deux pièces inégales (repérés A1- A2 et A3- A4).

Essai de restitution du premier bâtiment I


Les mobiliers, recueillis dans les sols en terre battue, sont relativement riches et variés. Des fragments de céramiques, des tessons de vases, des contre poids de métiers à tisser, cruches et amphores, ainsi que des monnaies en bronze concernant les empereurs romains FAUSTINE, COMMODE et GORDIEN,( fils de MARC AUREL), ont constitué un échantillon suffisamment représentatif pour dater l'occupation du site de Saint- Sauveur.

Monnaies en bronze retrouvées sur le site du Perron.
Document extrait de « Patrimoine en Isère »


D'autres fouilles auraient été nécessaires pour déterminer s'il s'agissait là d'un établissement autonome ou, au contraire, intégré dans un ensemble beaucoup plus vaste ! ! ! »

L'histoire de St. Sauveur sous l'occupation romaine reste à faire...

Le trafic sur l'Isère

Il est difficile aujourd'hui, d'imaginer que l'Isère a été une voie navigable et que le trafic sur cette rivière a pendant longtemps généré une activité intense dans les nombreux ports répartis sur sa partie navigable soit environ 170 kilomètres entre Montmélian et Valence. Cette grande voie fluviale faisait vivre une importante population tant sur l'eau que sur terre.
Petit rappel géographique: L'Isère prend sa source en Tarentaise, au glacier des Sources au pied de l'Iseran, près de la frontière italienne, à 2900 mètres d'altitude. Longue de 290 km, elle se jette dans le Rhône à Pont d'Isère ou la Roche de Glun (séparée en 1856) altitude 110 mètres. Dans sa partie supérieure, l'Isère est de type torrentiel. A l'entrée de la plaine du Grésivaudan, avec la diminution de sa pente, elle va perdre de sa vivacité. De la frontière de la Savoie jusqu'à Saint-Gervais, l'Isère divague, varie continuellement et embrasse une grande largeur, jusqu'à six cents mètres dans la plaine de Saint-Quentin, occasionnant la formation de méandres, de brassières et de nombreuses iles. En revanche, à partir de Saint-Gervais et jusqu'aux limites de la Drôme, elle entre dans des gorges et son lit se resserre entre des berges de molasse pouvant atteindre quelques dizaines de mètres de hauteur. La largeur de la rivière n'est par endroits que de 40 ou 50 mètres. C'est la partie la plus hérissée d'obstacles. Il est passé en proverbe que les gorges de l'Isère sont la ruine et le tombeau des voituriers.

Avec ses deux ports reliant Beauvoir et Izeron, son chemin de halage, son auberge située à Mayard et ses fermes qui hébergent pour la nuit les attelages de bœufs et leurs maitres, la paroisse va se développer tout au long des berges. Ce trafic va mobiliser jusqu'au milieu du 19ème siècle une main d'œuvre importante concentrée principalement dans les hameaux près de l'Isère : Micaux, Girons, Quincieux, Pangots, Brondel, Bedots etc....

Traverser l'Isère devient également un enjeu important pour développer les échanges commerciaux entre les deux rives. Deux bacs à traille seront installés sur la commune dès le 14ème siècle permettant de relier Saint-Sauveur à Beauvoir et à Izeron. (Celui de Beauvoir est attesté déjà en 1313). Ces bacs ou bateaux qui assuraient uniquement la traversée de la rivière d'un bord à l'autre permettaient le chargement des charrettes, des bêtes et des gens, moyennant un droit de passage. La traille était à l'origine le gros câble en corde de chanvre tendu entre les deux rives. Le bac, relié à la traille par le traillon, se déplaçait d'une rive à l'autre (sans rames ni moteur) grâce au courant qui venait frapper la coque placée en oblique.

Le bac à Beauvoir a repris du service en 1941 !
(après la destruction du pont suspendu en juin 1640 par l'armée française)

Le bac à traille reliant Izeron à Saint-Sauveur
installé par le service des ponts et chaussées avec l'aide du Génie, après la destruction du pont d'Izeron en juin 1940

(On reconnaît au premier plan, tenant leurs vélos, les deux filles Dafosse, cafetier de Saint-Marcellin, Marcel Ferrouillat et René Giraud, à l'arrière tout au fond, à droite, Jean Lagier)


La disparition des bacs à traille. Ces bacs avaient de nombreux inconvénients dont un majeur : celui d'empêcher la fluidité des transports des biens et des personnes entre les deux rives. Ces bacs seront remplacés au milieu du 19ème siècle par deux ponts suspendus.

Il faudra toutefois attendre le milieu du XIXème siècle et le développement industriel pour voir se développer la construction de ponts suspendus pour traverser l'Isère. Ils sont le plus souvent établis à l'emplacement des bacs à traille en reprenant le même principe de péage.

Ce type d'ouvrage, dit pont en fil de fer est dû à l'inventeur et architecte ardéchois Marc Seguin (né à Annonay le 20 avril 1786, marié en seconde noces à Augustine de Montgolfier). Son invention repose sur l'utilisation des câbles métalliques formés de faisceaux de fils de fer fins deux fois plus résistants que les chaines à maillons ou les barres de fer utilisés jusqu'alors. Ces ponts seront financés par de fortunés particuliers ou par des sociétés (Seguin et Cie d'Annonay ou Escarraguel frères architectes et entrepreneurs à Bordeaux) qui recevront une subvention de l'état. Un gardien, appelé Pontonnier percevait les droits de péage. Un portail en fer fermait l'accès au pont.


Le premier pont reliant Saint-Sauveur à Izeron, dit « pont Détroyat » fut ouvert au public le 1er mars 1849. Ce premier menaçant ruine, un deuxième pont fut reconstruit environ cinq cents mètres plus bas, près du domaine du Perron, et fut ouvert au public en janvier 1860.

Quant à celui reliant Saint-Sauveur à Beauvoir, il fut ouvert au public le 13 novembre 1847. Le conseil municipal avait voté à l'unanimité la dépense à la charge de la commune, pour la construction de ce pont, de la somme de deux mille six cent soixante sept francs...

Le pont suspendu reliant Beauvoir à Saint-Sauveur a remplacé le bac à traille

On aperçoit à la droite du pont la maison PERRAUD dite maison pontonnière.
Ce fut un café jusqu'en 1921

Les routes concurrencent la rivière : L'amélioration du réseau routier de la route royale n° 92 sur la rive droite d'une part et la réalisation sur la rive gauche, en 1841, de la départementale 532, d'autre part, va entraîner une réduction sensible du transport fluvial sur l'Isère. La voie de terre va forcément être préférée au parcours d'une rivière capricieuse, parsemée d'écueils, offrant des passages dangereux. Marius Finet, un des derniers mariniers (il est né en 1850 à Bourg de Péage) avouait avoir fait douze fois naufrage au cours de sa carrière !

On songe alors aux bateaux à vapeur pour sauver la navigation sur l'Isère. En effet, depuis plusieurs années, sur le Rhône, celle-ci a pris une extension considérable. Le maire de Grenoble, Hugues BERRIAT, prend l'initiative en 1838, d'un voyage d'essai. Il obtient qu'un petit vapeur rhodanien de la Compagnie Générale de Navigation, tente l'aventure. Mais l'essai est décevant. Ce vapeur, Le Commerce, (appelé aussi Le Courrier dans une lettre du 9 décembre 1839) «... a trouvé des obstacles insurmontables. Il a souvent touché le fond et n'a pu franchir certains passages qu'en se faisant haler par des bœufs. ».

Néanmoins, il fait une entrée triomphale à Grenoble « au son des fanfares et au bruit des salves de canons ». Il avait fait le trajet Valence / Grenoble en deux jours.

Une société dite : « SOCIETE DES BATEAUX A VAPEUR DE L'ISERE » sera même créée à Grenoble le 15 décembre 1844

Si en 1840, le trafic sur l'Isère entre Grenoble et Valence est encore important (402 bateaux et 945 radeaux transportent 35000 tonnes de marchandises) en 1852 on n'en transportera plus que 7000 tonnes. Une enquête sur le roulage des marchandises autour de Saint-Marcellin, entre 1840 et 1850, va inciter les politiques à orienter leur choix vers le trafic routier et ferroviaire. En effet, depuis 1840 on envisage la construction d'une ligne de chemin de fer reliant Grenoble à Valence par Moirans...( L'inauguration se fera le 9 mai 1864).
Cette nouvelle prise de position et le déclin de l'activité fluviale, va entraîner une migration de la population des hameaux de Saint-Sauveur proche de l'Isère vers le centre de la commune et le quartier de la Tronche.
Pourtant en ce début de 20ème siècle, quelques radeaux et de rares bateaux, vont encore naviguer sur l'Isère. Mais les constructions des barrages de Beaumont-Monteux en 1921 et de Pizançon en 1931, vont mettre un point final à cette navigation et au flottage des radeaux sur la rivière.

Le 27 juillet 1957, l'Isère est radiée de la liste des rivières navigables de France.

Extrait d'une étude sur l'histoire de Saint-Sauveur par P. et M. Hendboëg - Février 2012

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